à Ferney le 14e Mars 1773
J’avais répondu, Monsieur, à une de vos lettres dans laquelle vous paraissiez vous repentir de Vôtre faute.
Je vous avais mandé que Monsieur de Voltaire vous récompenserait si vous lui avouiez la vérité. Mais au lieu d’avouer cette vérité, vous avez persisté à vouloir tromper Mr De Sartine, et à soutenir que vous aviez travaillé à vôtre détestable édition sur l’édition publiée à Genêve. Ensuitte vous avez dit que c’était sur une édition de Lausanne.
Or, je vous déclare une seconde fois que les loix de Minos n’ont jamais été encor imprimées ni à Lausanne ni à Genêve, et que toutes les provinces voisines au nombre de plus de trois millions d’âmes peuvent vous démentir. Comment avez vous pu affirmer une fausseté si évidente?
Vous avez imprimé les loix de Minos sur une copie manuscrite de l’éxemplaire de mr Le Kain, dans lequel il y a plus de quarante vers qui ne sont pas de Mr De Voltaire, et qui ne se trouveront pas assurément dans l’édition qu’on fait actuellement à Genêve et qui paraîtra bientôt. Vôtre procédé n’est pas excusable, mais Monsieur de Sartine ne pouvait pas suposer que vous osassiez abuser à ce point de sa bonté.
Montrez l’éxemplaire que vous dites avoir reçu de Lausanne, on vous en défie. Vous ne montrerez que l’éxemplaire que vous aviez imprimé clandestinement sous le nom de Lausanne, avant d’avoir obtenu une permission tacite.
Monsieur de Voltaire ne veut point vous perdre, il en est bien éloigné; et si vous aviez eu la bonne foi de lui avouer vôtre délit vous vous en seriez bien trouvé. C’est tout ce que peut vous dire vôtre serviteur….
Wagniere secrétaire de Mr De Voltaire