1772-07-19, de Voltaire [François Marie Arouet] à Charles Augustin Feriol, comte d'Argental.

Puisque vous m’avez fait tenir, mon cher ange, le discours de Mr De Brequigny et sa lettre, vous permettrez que je vous adresse les remerciements que je lui dois.
Ou je me trompe, ou ce serait une bonne acquisition pour le théâtre de Paris, que cet acteur nommé Patraz qui a joué si parfaittement Lusignan, et qui jouerait de même Azémon. Celà ne ferait aucun tort à Brizart, l’un garderait sa couronne, et l’autre sa calotte de vieillard.

Je n’ai point entendu Mlle Camille, elle a de la réputation en province; mais celà ne suffit pas pour Paris, vous en jugerez.

Je ne sais si Lekain a bien fait de lire les loix de Minos dans plusieurs maisons, avant qu’il eût la dernière leçon. Je ne sais pas, non plus, s’il serait tenté de donner aux genevois une représentation de Gengiskan et une de Mahomet. Il me semble que le directeur ne pourait lui donner que cent écus par représentation. Vous pouvez le sonder, s’il a l’honneur de vous voir. Pour moi je vous enverrai les loix de Minos avant son départ. Je donne actuellement la préférence à mes moissons. Cérès doit l’emporter sur Melpomêne; mais personne ne l’emporte sur vous dans mon cœur.

V.

Quoi que les Lettres prétendues de Made de Pompadour ne soient pas bonnes, soiez très sûr qu’elle était incapable d’écrire de ce style autant qu’elle l’était de dire tant d’impertinences.