1771-08-03, de Voltaire [François Marie Arouet] à Charles Frédéric Gabriel Christin.

Mon cher philosophe, je crois vous avoir mandé que sur les Lettres que j’ai reçues je me tenais sûr de vôtre succez, si on peut être sûr de quelque chose dans ce monde.

J’avais envoié à Mr Marie une petite boëte à son adresse, comme vous me l’aviez dit d’abord. J’en fais partir une seconde, et une autre encor à Made De Meulan, selon vos nouvelles directions.

Made De Beaufort demande à M: le chancelier la grâce de son mari, lequel ne demandait qu’un sauf conduit. Je crois que celà dépendra des informations. On prétend qu’il y a double sacrilège et simple assassinat, double sacrilège parce qu’il y a meurtre de prêtre dans une église, assassinat parce qu’ils étaient deux, le comte de Beaufort et un jeune avocat lesquels ont tout deux pris la fuitte. L’avocat Loyseau de Lyon, qui était à Genêve, avait commencé un beau factum en faveur de Mr de Beaufort. Il prétendait que le prêtre n’était mort que pour faire niche à l’accusé. Il a renguainé son factum, et il est allé à Paris.

J’espère que Mr vôtre frère aura bientôt un bon emploi, et que vous reviendrez bientôt victorieux à st Claude revoir vôtre petite maîtresse.

Je vous embrasse le plus tendrement du monde.

V.