1771-11-16, de Voltaire [François Marie Arouet] à Charles Frédéric Gabriel Christin.

Mon cher philosophe bienfesant, je vous suis de loin.
J’écris et je fais agir pour nos esclaves. Je suis très aise que le jugement soit différé. Ce délai me fait croire qu’on veut avoir le tems de préparer un règlement général. Cette réforme si nécessaire dans la jurisprudence française, si digne du Roi et de Mr le chancelier, peut donner au gouvernement une gloire éternelle. Je ne cesse de le dire, et je vais même en conséquence prendre la Liberté d’écrire sur cette importante affaire une Lettre raisonée à Mr le chancelier et à Mr le Marquis De Montaynard, qui semblent tout deux m’enhardir à cette démarche par les bontés dont ils m’honorent.

Le procez criminel du nommé Monbailly, roué à st Omer, n’est pas tout à fait comme on me l’avait dit, mais il résulte toujours que le mari éxécuté et la femme condamnée à être brûlée étaient entièrement innocents.

Je vous prie de faire bien mes compliments à Monsieur Denis et à Monsieur son fils, aussi bien qu’à Madame Denis.

J’ai envoyé il y a près d’un mois le 6e et le 7e à Mr d’Ogny pour Mr Marie. Je suis bien surpris que Mr Marie ne les ait pas reçus.

Je vous embrasse bien tendrement.

V.