1771-06-15, de Voltaire [François Marie Arouet] à Maria Anna Louisa Jablonowska, princesse de Talmont.

Made,

Un vieillard aveugle et mourant, a été instruit par les yeux d’autrui que vôtre cachet était à une Lettre du 4 juin non signée de vous.
Ce vieillard est fort éloigné d’oser se mêler des querelles des nations; vous lui avez rendu la vôtre trop respectable; elle a sauvé Vienne du joug des Ottomans, et peutêtre un jour contribuera t-elle à chasser de l’Europe ces usurpateurs barbares. Il y a longtems qu’on en serait délivré si les princes chrétiens avaient pu préférer l’honneur et le salut public à ce qu’ils ont cru leur intérêt. Les personnes de vôtre sexe et de vôtre naissance qui triomphent aujourd’hui par mer et par terre de ces déprédateurs du genre humain me paraissent sûres, du moins par ce côté, dignes de votre estime.

Il n’apartient pas à un vieillard obscur et mort au monde de porter ses vues plus loin. Il se souvient avec reconnaissance de vos anciennes bontés, et vous est attaché, Madame, avec beaucoup de respect.