21 octb [1760] au soir
J'avais refusé net mr Labat mon cher correspondant.
La cour russe est encore bien russe; on ne s'imagine pas dans ce pays là qu'on puisse rendre service sans intérest, et dans les circomstances où je me trouve avec cette cour il m'importe baucoup de n'être pas soupçonné d'une chose dont je suis si éloigné. Mais mon cher monsieur il n'y a point de considération qui me retienne quand il s'agit de vos volontez. Le plaisir de vous obéir l'emporte sur tout.
Voicy ma lettre à cachet volant avec le mémoire.
J'irai chez mr Cathala recevoir la pacotille.
Nous faisons à l'académie française une petite collecte. Je donne 600lt. Je me suis avisé d'envoyer à mr Duclos, notre secrétaire perpétuel, une lettre de change de 600lt sur mr du Verger et la lettre porte que vous le rembourserez. Je vous prie d'en écrire à m. du Verger en conformité.
Voylà donc les Autrichiens et les Russes qui soupent et couchent dans Berlin avec les Brandebourgeoises après que les Prussiens ont soupé et couché dans Dresde avec des Saxonnes. C'est la loy du talion. Luc méritait d'être puni. C'est un vaurien. Mais j'ay peur qu'il ne soit trop puni et que nous ne soyons un jour les duppes de tout cecy sur terre comme nous l'avons été sur mer.
On dit que M. Bertin n'est plus si bien avec Mr de Montmartel. Dieu les bénisse! Je tâche d'être bien avec tout le monde. Made la marquise, mr le duc de Choiseuil me donnent tous les jours des marques de la plus grande bonté. Si les châtaux ne me ruinaient pas, je serais fort content. Mais au moins je n'en fais point en Espagne.
Bonsoir monsieur. L'oncle et la nièce sont pr jamais à vous.
V.