Monsieur,
J’irai bientôt trouver Monsieur vôtre frère; ma vieillesse et mes maladies me font envisager ce moment comme fort prochain.
J’ai emploié à le regreter tous les jours que la nature m’a laissés. Vôtre Lettre et ses ouvrages font ma consolation. Je vois que vous partagez le talent qu’il avait d’écrire avec sentiment et avec grâce, et que je dois aux deux frères l’estime infinie que j’avais pour celui que nous avons perdu. Ma reconnaissance et ma consolation seraient parfaittes si je pouvais avoir tous ses ouvrages. J’y retrouverais son goût et ses connaissances qui fesaient le charme de sa conversation; ils me rendraient les heures délicieuses que j’ai passées avec lui.
Je vois par la lettre dont vous m’honorez que je les retrouverais encor plus dans Monsieur son frère.
J’ai l’honneur d’être avec tous les sentiments que je vous dois,
Monsieur
Vôtre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire
19e 9bre 1770, au Château de Ferney par Geneve