1766-02-17, de Voltaire [François Marie Arouet] à Lazzaro Spallanzani.

Monsieur,

Je reçus, il y a quelques semaines, par la voie de Genêve, deux dissertations phisiques, sans nom d'auteur.
Il n'y avait point de Lettre dans le paquet. Je viens d'apprendre que ces deux ouvrages qui montrent une grande sagacité, et des connaissances très aprofondies, sont de vous, Monsieur, et sont dignes d'en être. Je voudrais pouvoir vous remercier dans vôtre belle langue italienne que vous parlez avec tant de politesse, mais l'état où je suis ne me permet pas d'écrire; ma vieillesse et mes maladies me réduisent à dicter.

Vous avez très grande raison de combattre les prétendues expériences de Mr Needham. On l'a attaqué depuis peu à Genêve sur les miracles. Il pourait se vanter en éffet d'avoir fait des miracles s'il avait pu produire des anguilles sans germe. Il faut se défier de toutes ces expériences hazardées, qui contredisent les loix de la nature. Il parait que vous mettez autant d'éxactitude dans vos expériences, que de justesse dans vos raisonnements. On ne peut après vous avoir lu vous refuser la plus parfaitte estime. C'est avec ces sentiments, et avec beaucoup de reconnaissance que j'ai l'honneur d'être,

Monsieur

Vôtre très humble et très obeïssant serviteur

Voltaire gentilho͞e ord. de la chambre du roy