1770-11-05, de Voltaire [François Marie Arouet] à Christian VII, king of Denmark.

Sire,

Mr Dalembert m'a instruit des bontez de votre majesté pour moy.
Tant de générosité de votre part ne m'étonne point, mais l'objet m'en étonne. Ce n'était pas sans doute à un simple citoien comme moi qu'il fallait une Statue. L'Europe en doit aux Rois qui voiagent pour répandre des lumières, qui ont la modestie de croire en acquérir, qui donnent des exemples en prétendant qu'ils en reçoivent, qui emportent les vœux de tous les peuples chez les quels ils ont été, qui ne revoient leurs sujets que pour les rendre heureux, pour en être chéri et pour les vanger des barbares.

Je suis prest de finir ma carrière lors que votre majesté en commence une bien éclatante. L'honneur qu'elle daigne me faire répand sur mes derniers jours une félicité que je ne devais pas attendre. Je sens combien il est flatteur de finir par avoir tant d'obligation à un tel monarque.

Je suis avec le plus profond respect

et la plus vive reconnaissance

Sire

de votre maj.

le t. h. tr. ob. et très obligé.