1770-03-19, de Voltaire [François Marie Arouet] à Élie Bertrand.

Je suis, Monsieur, aussi honteux que reconnaissant.
Tous les bienfaits sont de vôtre côté, et tous les torts sont du mien. Je vous devais depuis longtems une réponse à une Lettre charmante que vous m'aviez écrite. Mais que ne vous dois-je point pour l'article droit Canonique? Je ne sais rien de mieux pensé, de plus méthodique, de plus vrai. Vous avez été prêtre, et vous immolez la prétraille à la vérité, et à l'intérêt public. Vôtre courage est aussi respectable que vôtre écrit est bien fait. Il y aura peut être quelques endroits qu'on vous demandera la permission d'élaguer, parce qu'ils sont déjà traittés dans quelques autres articles.

Si vous avez du loisir, si vous voulez rendre service au genre humain, donnez nous encor quelque chose sur la primitive église; sur l'égalité des prêtres et des Evêques; sur les usurpations de la cour Romaine; sur tout ce qui vous passera par la tête. Tout ce qui sortira de cette tête achêvera d'éclairer les autres cervelles. Il faut que le feu de la vérité porte la lumière dans les yeux de tous les hommes honnêtes, et brûle les yeux des tirans.

On ne peut vous estimer et vous aimer plus que vôtre collaborateur

V.