29e xbre 1769
Bonsoir et bon an à tous mes chers neveux.
Voilà Monsieur d'Hornoy constitué controlleur général de toute la famille. Il tiendra plus longtems que Mr D'Invau. Vous savez qu'on appellait autrefois le trésor de la Perse l'oreiller du Roi. Il faut qu'à Versailles on dorme d'un bon sommeil sur son oreiller. On dort aussi à Paris, on ne paie personne, il n'y a que les pauvres créanciers qui ne dorment pas.
Mon cher magistrat, je vous suplie de vous servir de la première procuration puisque vous trouvez la dernière peu légale. Le grand point est de se mettre en règle pour la succession de Guise. Elle doit, dit-on, plus de trente mille livres. Tous les créanciers doivent faire leurs diligences. C'est une précaution nécessaire qui ne peut offenser personne.
A l'égard de Mr le Mal De Richelieu je crois qu'il faudra y aller par requête, par amis, par la protection des vieilles, par tout ce qui peut toucher le cœur d'un seigneur de la cour de France.
Les seigneurs de Virtemberg seront plus aisés à subjuguer, attendu qu'ils ressortissent à un de nos parlements, tuteur du Comté de Montbelliard.
Pour vous autres tuteurs des rois tâchez de nous donner un grand Tefterdar qui sache au bout de l'année la dépense à la recette, et avoir encor de quoi donner des étrennes aux Dames. L'abbé vous dira ce que c'est qu'un Tefterdar.
Mon cher Turc je vous remercie de vouloir bien prendre Charles 12 pour le témoin de mr Desalleurs; vous lui faittes bien de l'honneur. Si vous voulez pousser jusqu'à Moustapha vous verrez que ma Catau lui a pris en une année la Moldavie, une partie de la Bessarabie, Azoph, Taganrok, la Georgie, une partie de la Mingrelie, les frontières de l'Arménie. Si Dieu bénit sa flotte comme je l'espère, et si les Vénitiens retrouvent leurs robes, comme je l'espère encor, les Dames séront vengées des marauts à Turban qui les renferment.
J'embrasse de tout mon cœur Monsieur et madame De Florian.