1769-09-27, de François Joachim de Pierres, cardinal de Bernis à Voltaire [François Marie Arouet].

On ne peut rien faire de plus, mon cher confrère, pour la perruque de votre aumônier.
J'espère que m. l'évêque de Genève ne sera pas plus rigoureux pour lui que le saint siége. L'attestation que vous m'avez envoyée m'a fait rire; c'était votre intention. Il est vrai que jusqu'ici les épines sur lesquelles je marche n'ont pas blessé mes pieds. Si le pape avait un peu voyagé, s'il avait respiré un autre air que celui de Rome, il aurait des vues plus étendues, et son ton serait très aimable. Il a tout l'esprit que la nature peut donner à un homme qui n'a connu que le cloître et les congrégations. Il veut bien vivre avec les souverains, ne point tyranniser les consciences, et souffrir avec douceur le mal qu'il ne peut empêcher. Je ne me repens pas de lui avoir donné mon suffrage accompagné de plusieurs autres. Au surplus, ma santé a très bien résisté aux chaleurs, et mon âme résistera encore mieux aux petites tracasseries, qui sont les fruits naturels du pays que j'habite. Quand vous ferez quelque folie honnête, soit en vers, soit en prose, souvenez vous de votre admirateur, et du plus fidèle vos serviteurs et confrères.