Fernex ce 30 mars 1769
Monsieur,
Comme c'est notre devoir de consulter nos supérieurs dans les choses qui regardent nôtre Etat c'est avec confiance que je m'adresse à vous.
Voici le fait, le sr de Voltaire le mardi de la semaine sainte me fit demander chés luy, me disant qu'il avoit la fièvre, et qu'il vouloit qu'on luy portât le viatique. Je luy dis qu'il n'étoit pas malade pour exiger cela, il me répondit qu'il ne vouloit encourir les peines de l'Eglise. Je luy répondis que s'étant présenté il ne pouvoit pas les encourir, que d'ailleurs il devoit se préparer aux sacrements par des dispositions qui ne luy étoient pas inconnues. Depuis ce tems là il n'a fait que m'inquiéter, et m'envoier des Billets et il me menace du parlement, et de l'infraction des ordonnances du Roy. Vous trouverés cy jointe cela avec cette Lettre qu'il m'a envoié sur le midy. Je vous suplie de me marquer comment je dois agir et avoir la complaisance de le mettre tout au long sur le papier. Je suis bien fâché que mon infirmité me prive de l'honneur de vous aller rendre mes devoirs, vous priant d'être bien persuadé du parfait respect avec le quel j'ay l'honneur d'être,
Monsieur
Votre très humble et obéissant serviteur
Gros Curé