1768-06-06, de Voltaire [François Marie Arouet] à Paul Philippe Gudin de La Brenellerie.

Si je n'ai pas eu l'honneur, monsieur, de vous remercier plus tôt, pardonnez à un vieillard malade.
Je n'en ai pas moins senti le mérite de votre pièce et les bontés dont vous vouliez m'honorer. Je viens de lire votre tragédie qui a été imprimée à Geneve depuis un mois; il n'y a plus moyen de vous parler en critique quand l'ouvrage est publié; je ne dois vous parler qu'en homme très reconnaissant et surtout très persuadé que de pareils sujets mériteraient d'être mis souvent sur la scène. Il est vrai qu'ils sont difficiles à traiter; mais il paraît à votre coup d'essai que vous seriez capable de faire des chefs d'œuvre; la conformité de votre manière de penser avec la mienne semble me permettre de compter un peu sur votre amitié; les philosophes n'ont plus d'autre consolation que celle de se plaindre ensemble.

J'ai l'honneur d'être avec tous les sentiments que vous méritez

monsieur

votre très humble et très obéissant serviteur

V…