à Ferney 16e Mars 1768
Messieurs,
J'ai reçu les deux billets de son Altesse sérénissime.
J'en ai sur le champ donné avis à Mr Jaquelot qui part dans quelques jours pour le Languedoc. Il me mande qu'il aportera l'argent chez moi avant de partir, en déduisant les deux années à cinq pour cent. Je supose qu'il entend l'intérêt de soixante et dix mille Livres pour la premiére année, et de Trente cinq mille pour la seconde. Il fera le compte lui même.
Pour vous, Messieurs, je me flatte que vous aurez la bonté de vouloir bien m'envoier un double du compte que j'ai eu l'honneur de vous remettre, qui se montait à 51392 £: et qui à la fin du mois de mars où nous sommes se montera à la some de soixante et six mille neuf cent vingt trois livres.
Il vous serait aisé, Messieurs, de répartir cette some sur plusieurs fermiers ou régisseurs qui donneront chacun leur soumission pure et simple, de me paier au temps désigné, chacun la portion qui lui sera assignée. Ils y joindront aussi la promesse de me paier de préférence à tout, les quartiers de mes rentes, chacun dans le temps désigné par vous. Moiennant cet accord tout sera parfaittement en règle; nous serons débarassés vous et moi d'une discussion qui doit vous fatiguer beaucoup et qui désole ma vieillesse.
J'ai l'honneur d'être avec tous les sentiments que je vous dois
Messieurs
Vôtre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire