1768-03-01, de Voltaire [François Marie Arouet] à Alexandre Marie François de Paule de Dompierre d'Hornoy.

Mon cher magistrat, maman, made Dupuits, feront bientôt ce que je voudrais faire, elles vous embrasseront.
Il faut absolument que maman passe quelque temps à Paris pour ses gencives qui sont dans un état menaçant et il faudra que j'aille moi même mettre un ordre invariable dans mes affaires avec Mr Le Duc de Virtemberg, qui ne me devra jamais douze années comme les maréchaux de France.

Je vous prierai de partager entre elle et moi tout ce que me doit Mr Le Maréchal de Richelieu qui se monte à 27425ltà ce que je crois. Il conviendra que le tout soit paié à la fois. Maman qui a beaucoup vécu avec lui se fera mieux paier qu'un sergent à verge. Il est vrai qu'elle n'est plus dans l'âge qui ouvre la bourse des Ducs et Pairs; mais une ancienne liaison est toujours respectée. Certainement vous viendrez tout deux à bout de dégraisser l'abbé Blet.

Mes compliments au Turc du grand conseil. Vous verrez par le petit écrit cy joint qu'on fait des compliments à de plus puissants seigneurs, et qu'on est fort poli dans ce siècle. Je ne sais pas qui est le complimenteur, mais il me parait fort honnête.

Aureste, je ne suis pas tout à fait de l'avis de mon confrère Seguier, sur l'histoire impartiale des Jesuites. Mon confrère me parait un peu partial.

Je vous embrasse, mon gros magistrat, le plus tendrement du monde.

Ah! que vos confrères feront bien mieux d'obtenir la supression de tous ces offices ridicules qui ruinent l'état, et qui le déshonorent! C'est un sujet qui doit être traitté avec beaucoup de force, et l'éloquence la plus attendrissante. Mais vous avez plus de Catons que de Cicérons.

N.b. Il serait plaisant d'énoncer qu'il se serait répandu un libelle diffamatoire contre la maison de France, etc. sous le nom de bulle etc. et que pour vanger l'honneur du st père si horriblement compromis on ordonne qu'on brûlera icelle au pied du grand escalier.