1767-07-20, de Voltaire [François Marie Arouet] à Louis Joseph de Bourbon, prince de Condé.

Monseigneur,

Je suis trop respectueusement attaché à votre auguste nom et à la personne de votre altesse sérénissime, pour ne pas lui donner avis que La Baumelle, retiré à présent au pays de Foix, dans la petite ville de Mazères, fait réimprimer à Avignon le livre abominable dans lequel ce calomniateur ose accuser monseigneur le duc votre père, d'avoir fait assassiner le sieur Vergier, ancien commissaire de marine.

Cette horreur, jointe à tant d'autres, doit certainement être réprimée. L'audace criminelle de ce misérable donne du cours à ses livres, surtout dans les pays étrangers. Je suis persuadé que, si votre altesse sérénissime daigne dire ou faire dire un mot à m. de Saint Florentin, on préviendra aisément cette nouvelle édition. Vous verrez, monseigneur, dans le mémoire ci-joint, la page où ce coquin ose ainsi vous outrager. Vous y verrez ses autres crimes. Jamais l'abus de l'imprimerie n'a rien produit de si coupable. Les sentiments que la France a pour votre personne, autorisent la liberté que je prends.

Je suis avec un profond respect,

Monseigneur,

de votre altesse sérénissime,

le très humble et très obéissant serviteur

Voltaire