au château de Ferney par Genêve 20e fév: 1767
Monsieur,
Pour répondre à la confiance dont vous m'honorez, souffrez que je vous dise que le manuscrit de vôtre ami ne doit point paraître, à mon avis, dans l'état où il est.
Je pense qu'il ne doit point parler de lui. Son intèrêt particulier nuirait au bien général qu'on doit toujours envisager. Il donnerait d'ailleurs trop de publicité à une avanture qu'il doit ensevelir dans l'oubli.
Il faut absolument retoucher le stile en plusieurs endroits. Je pense encor que pour rendre ce morceau plus intéressant il faudrait y joindre quelques réfléxions sur les abus qui partent de la même source. Les maladies dont je suis accablé ne me permettent pas de travailler à présent, mais si je me rétablis je me ferai un vrai plaisir de chercher à mériter vôtre confiance; je sçais quel est vôtre mérite.
J'ai l'honneur d'être avec les sentiments respectueux qu'il m'inspire
Monsieur
Vôtre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire gentilhom ord. de la chambre du Roy