1767-02-16, de Voltaire [François Marie Arouet] à Jean Baptiste Jacques Élie de Beaumont.

Mon cher Ciceron, vous venez de faire pleurer le bon homme Sirven de tendresse et de reconnaissance.
Recevez mes nouveaux remerciements. Ajoutez à toutes vos bontés celle de dire à Mr Target vôtre ami, combien je suis touché de ce qu'il veut élever sa voix en faveur des filles de Sirven. Je vous réponds que ce bon homme ne s'adressera pas à d'autres qu'à vous. Les Calas étaient conduits par cinq ou six protestants du Languedoc, et Sirven n'a d'apui que moi, il ne peut, ni ne doit se conduire que par mes conseils et par vos ordres. Vous savez avec quelle impatience j'attends vôtre mémoire imprimé. Il n'y a certainement pas un moment à perdre; mr De Chardon m'a mandé qu'il serait bientôt prêt, malgré l'affaire de la Cayenne qui lui prend tout son temps; il est humain, il est philosophe et bon juge; je compte sur lui comme sur vous. Vous aurez la gloire d'écraser deux fois le fanatisme, et les protestants éclairés d'ailleurs par vôtre éxcellent mémoire contre mr De La Roque, ne seront plus fâchés contre madame De Canon à qui je présente mes très tendres respects.

NB: Vous ferez très bien d'avertir par une note que ces longs délais ne doivent être imputés ni aux Sirven, ni à vous. La note est nécessaire, et je vous en remercie. Je vous suis aussi tendrement attaché que si j'avais vécu avec vous.

V.