Le 31 [August 1766]
Les ordres et volontés de mon cher et respectable patron ont été exécutés hier au moment de mon arrivée.
Voilà quel a été l'emploi de ce premier moment et le seul qui pouvait suspendre les regrets de m'être éloignée de vous. Et tout ce qui connaîtra comme moi cette belle âme et la bonté de votre cœur, joindra à l'admiration qui vous est bien due, ce sentiment tendre que je vous ai voué pour ma vie. Je n'ai pas les mêmes titres pour l'obtenir, mais si l'attachement a des droits je pourrais exiger beaucoup. Vous vous intéresseriez à moi, vous me donneriez souvent de vos nouvelles, et de tout cet intérieur charmant dont je suis idolâtre et qui sera envié par tous les gens sensibles et assez sensés pour juger que le vrai bonheur consiste à faire des heureux, mériter des amis et savoir en jouir. Ce tableau est bien éloigné de tout ce que je vais retrouver dans la société et me la rendra bien insipide, mais je serai beaucoup chez moi, et grâce à vos dons j'aurai de quoi m'occuper mais ce n'est plus du génie universel d'où dépendra mon agrément. Je veux encore intéresser votre cœur. Il faut que vous ayez un peu d'amitié pour moi, que vous me regardiez comme quelqu'un qui vous est entièrement dévouée que j'aie souvent de vos nouvelles et que je sois sûre que vous êtes parfaitement heureux.