1766-07-03, de Voltaire [François Marie Arouet] à Dominique Louis Ethis de Corny.

Mes vaches et moy monsieur nous vous avons beaucoup d'obligation.
Je vous remercie au nom de tout le troupeau. On nous avait accuséz fort injustement d'avoir la peste. Pour moy il y a longtemps que je suis acoutumé à la calomnie, mais avec Monsieur de la Coré et avec vous je n'ay rien à craindre. Mes vaches paissent tranquilement dans vos montagnes et je traîne ma vieillesse en paix dans ma retraitte. Je ne sçais comment reconnaitre monsieur la bonté que vous avez eue de démêler en ma faveur l'histoire du comté de Montbeliard. Cette affaire est pour moy d'une plus grande conséquence que mon troupeau: car j'ay mis la plus grande partie de mon bien sur Monsieur le duc de Virtemberg. Je me flatte que ny moy ny mes héritiers, nous ne serons jamais réduits à nous adresser au parlement de Bezançon. Le duc de Virtemberg en agit avec moy avec toutte la noblesse d'un prince. Si dans la suitte quelque cas imprévu exigeait des discussions, je profiterais des lumières que vous avez bien voulu me donner et je commencerais surtout par venir vous remercier. Je ne peux vous exprimer avec quelle reconnaissance j'ay l'honneur d'être Monsieur votre très humble

et très obéissant serviteur

Voltaire