19 mars [1766]
M. Delaleu, mon cher ami, vous donnera tout ce que vous prescrirez.
J'attends avec mon impatience ordinaire cette estampe et le mémoire de notre prophète Elie. Il est sans doute signé de plusieurs avocats dont il faut payer la consultation. Daignez donc donner à m. de Beaumont ce qu'il faudra, et rendez ces services essentiels à la philosophie.
Oh que j'aime cette philosophie agissante et bienfaisante! Il y a dans le discours de m. de Castillon un bel éloge de cette vraie philosophie, qu'il rend compatible avec la religion, ainsi qu'il le devait faire dans un discours public.
Le roi de Prusse mande que sur mille hommes on ne trouve qu'un philosophe; mais il excepte l'Angleterre. A ce compte il n'y aurait guère que deux mille sages en France; mais ces deux mille en dix ans en produisent quarante mille et c'est à peu près tout ce qu'il faut, car il est à propos que le peuple soit guidé, et non pas qu'il soit instruit. Il n'est pas digne de l'être.
J'ai lu Henri 4. Je pense comme vous; mais je crois que si on permettait la représentation de ce petit ouvrage il serait joué trois mois de suite, tant on aime mon cher Henri 4, et je ne vois pas pourquoi on prive le public d'un ouvrage fait pour les Français.
Pourriez vous, mon cher ami, m'envoyer Le Philosophe sans le savoir? J'ai bien de la peine à écrire de ma main. Vagniere est malade et un autre copiste est occupé.
Voici une petite lettre pour Laleu et une autre pour Briasson, qui me néglige. Mais parlez moi donc du dictionnaire. Les souscripteurs l'ont ils? Maître Beaudet s'oppose-t-il à la publication? Les Baudets ne passeront pas les trois volumes de mélanges. Il faudra du temps, il faudra attendre qu'il y ait quarante mille sages.