2 février 1766
Mon cher frère, il y a deux hommes attendris et hors d'eux mêmes; c'est Sirven et moi.
Vous trouverez ici mes remercîments au généreux m. de Beaumont; je vous prie de les lui faire passer. Je renverrai incessamment son mémoire. Je commence à espérer beaucoup. Il me paraît bien difficile qu'on résiste à des faits si avérés, à de si bons raisonnements et à tant d'éloquence.
M. Bastard, premier président du parlement de Toulouse, que sa compagnie tient toujours exilé à Paris, pourra nous servir bien utilement. Je ne vous dis rien du factum, vous verrez exactement ce que j'en pense dans la lettre que j'écris à l'auteur. Je vous enverrai le billet de Merlin dès que je serai sorti de mon lit où je suis, et que j'aurai fouillé dans mes paperasses.
Mes voisins les gennevois sont toujours très tranquilles. On n'a pas voulu me croire. J'assurai toujours qu'il n'y aurait pas la moindre ombre de tumulte. Il est plaisant de se donner la peine d'envoyer des ambassadeurs, parce que dans une petite ville fort au dessous d'Orleans et de Tours, il y a deux avis différents. Depuis les grenouilles et les rats qui prièrent Jupiter de venir les accommoder, il ne s'est rien vu de semblable.
Je suis toujours très languissant. J'ai besoin du repos de l'âme. Je voudrais qu'on cessât de prendre garde à moi et qu'on ne m'imputât point de mauvaises plaisanteries que deux hommes de l'académie de Berlin ont faites depuis quelques mois sur les miracles de Rousseau. Ce sont des lettres dont quelques unes sont assez comiques, mais qui pourraient l'être davantage si on s'était livré à tout ce que le sujet fournissait.
Je n'ai point encore reçu le ballot de Fauche. Tout le monde m'abandonne dans cette rude saison. Vous en jugerez par la réponse que je fais à Briasson. Je recommande ce petit billet à vos bontés.