1766-01-19, de Voltaire [François Marie Arouet] à Jean André Deluc.

Mr Bertrand est à Varsovie, Monsieur, mais la Lettre de mr De Freudenrich l'un des premiers seigneurs de Berne suffira.
C'est à vous à juger si j'ai mérité les invectives qu'un homme dont je déplore la mauvaise conduite et les malheurs a vomies contre moi depuis cinq ans. Décidez s'il a dû m'insulter et me calomnier dans les Lettres de la montagne; j'ose dire encor que j'ai mieux servi la République que lui puisque je n'ai cherché qu'à rétablir la concorde. Il y a plusieurs ouvrages de cet auteur que je n'ai point approuvez; mais si on lui a dit que je n'étais pas son admirateur, il ne devait pas être mon calomniateur. Je sais que l'amour propre d'un écrivain est bien fort, mais il ne doit pas l'être jusqu'à l'emporter sur sa probité. Je le plains, mais il doit rougir. Vous êtes trop juste pour condamner mes sentiments, et pour ne pas aimer ceux avec lesquels je serai toute ma vie, Monsieur, Vôtre très humble et très obéïssant serviteur

Voltaire