10 jer 1766
Vous m'avez recommandé, monsieur, de vous envoyer les petites brochures innocentes qui paraissent à Neufchatel et à Geneve.
En voici une que je vous dépêche. Il serait à souhaiter que nous ne nous occupassions que de ces gaietés amusantes; mais nos tracasseries toutes frivoles qu'elles sont nous attristent. M. de Voltaire, votre ami, a fait longtemps tout ce qu'il a pu pour les apaiser; mais il nous a dit qu'il ne lui convenait plus de s'en mêler quand nous avions un résident qui est aussi sage qu'aimable. Nous aurons bientôt la médiation et la comédie, ce qui raccommodera tout.
Le petit chapitre intitulé du czar Pierre et de J. J. Rousseau, est fait à l'occasion d'une impertinence de Jean Jaques, qui a dit dans son contrat insocial que Pierre premier n'avait point de génie, et que l'empire russe serait bientôt conquis infailliblement.
Le dialogue sur les anciens et les modernes est une visite de Tullia, fille de Ciceron, à une marquise française. Tullia sort de la tragédie de Catilina, et est tout étonnée du rôle qu'on y fait jouer à son père. Elle est d'ailleurs fort contente de notre musique, de nos danses et de tous les arts de nouvelle invention et elle trouve que les Français ont beaucoup d'esprit, quoiqu'ils n'aient point de Ciceron.
J'ai écrit à m. Fauche. Voilà, monsieur, les seules choses dont je puisse vous rendre compte pour le présent. J'ai l'honneur d'être, monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur,
Boursier