19e 9bre 1765
Mon cher frère, voicy des guenilles qui ne sont pas miraculeuses, mais dans lesquelles un honnête impie se moque prodigieusement des miracles.
Le profête Grimm en demande quelques éxemplaires, je vous en envoie cinq. Ce ne sont là que des troupes légères qui escarmouchent. Vous m'avez promis un corps d'armée considérable. J'attends ce livre de Fréret qui doit être rempli de recherches savantes et curieuses. Envoyez moi une bonne provision. La victoire se déclare pour nous de tous côtés. Je vous assure que dans peu il n'y aura que la canaille sous les étendarts de nos ennemis, et nous ne voulons de cette canaille ni pour partisans, ni pour adversaires. Nous sommes un corps de braves chevaliers, deffenseurs de la vérité, qui n'admettons parmi nous que des gens bien élevés. Allons brave Diderot, intrépide d'Alembert, joignez vous à mon cher d'Amilaville, courez sus aux fanatiques et aux fripons; plaignez Blaise Pascal, méprisez Houtteville et Abadie autant que s'ils étaient pères de l'église. Détruisez les plattes déclamations, les misérables sophismes, les faussetés historiques, les contradictions, les absurdités sans nombre; empêchez que des gens de bon sens ne soient les esclaves de ceux qui n'en ont point. La génération naissante vous devra sa raison et sa liberté.
N'oubliez pas de presser Briasson de tenir sa promesse. Je peux mourir cet hiver, et je ne veux point mourir sans avoir eu entre mes mains tout le dictionaire enciclopédique. Je commencerai par lire l'article vingtième.