à Louisbourg, 4 may 1765
Monsieur,
Je suis infiniment flaté, de ce que mon sentiment sur ce qui concerne la vente de Terres d'Alsace de S. A. S. ait trouvé votre aprobation.
Ce marché me paroit si contraire à ses Intérêts et ce qui plus est, à sa gloire, que je n'y prêterai sûrement point les mains aussi lontemps que je serai à la tête des affaires.
Je conviens volontiers avec vous Monsieur, que le corps vis à vis duquel vous voulés bien m'accorder la qualité de bon médecin, pourroit avoir besoin de quelque régime. Mais l'expérience nous aprend, que ce remède si simple et si naturel en soi-même, est cependant pour la plûpart très difficile à faire adopter par les malades qui en ont le plus besoin, soit parce qu'ils ne veulent pas toujours écouter et suivre les conseils qui les assujetissent à une certaine gène, soit parce qu'ils préfèrent souvent leurs meaux à ce même remède. Tout cela n'empêchera pas, que S. A. S. vû sa pénétration supérieure et éclairée, n'y ait recours tôt ou tard.
Vous étes Monsieur, on ne peut pas plus obligeant, de vouloir bien nous offrir votre entremise auprès de M. Le Duc de Praslin dans les différents qui existent entre Le Sm͞e Duc et les Etâts de son Pays. Je croirois abuser de votre complaisance, si je vous cachois, qu'il ne nous reste pas la moindre chose à désirer du côté de la Cour de Versailles, mais comme vous l'observés très bien, nous avons encore plus besoin de celle de Vienne.
Vous me comblés Monsieur, par les conseils que vous me donnés et par les offres que vous me faites relativement à la maladie de ma fille. Malheureusement elle n'est plus. Sa maladie, qui come vous le dites, étoit positivement celle du poumon, l'a enlevée à la fleur de son âge, le 15 du mois passé entre 9 et 10 heures du matin. Je ne vous entretiendrai pas de la douleur que me cause cette perte, elle est au delà de toute expression. Le coup dont j'ai été frappé, est d'autant plus sensible, qu'il ne me reste plus d'enfant qu'une fille issue du second Lit.
L'amitié dont vous m'avés honoré jusqu'ici Monsieur, ne me laisse pas douter, que vous ne preniés quelque part à ma tristesse et que vous n'aprouviés les regrets que je dois à tant de titres légitimes aux cendres de la défunte.
Puissiés vous Monsieur, vivre les années qui manquoient à celle ci, puissiés vous jouir avec tous ceux qui vous sont chers, de la prospérité la plus parfaite jusqu'à l'âge le plus reculé.
Ces voeux sont dictés par les sentimens de la haute éstime et de l'attachement inviolable avec lesquels j'ai l'honneur d'être,
Monsieur,
Votre très humble et très obéissant serviteur
le Cte de Montmartin