1764-12-26, de Voltaire [François Marie Arouet] à Gabriel Cramer.

J'ai reçu l'histoire de la destruction des jésuites; c'est le livre le plus sage, et en même temps le plus hardi, le plus philosophique, le plus adroit, le plus curieux, le plus agréable, qu'on ait écrit depuis les Lettres provinciales. Je le lis, j'en suis enchanté. Préparez vos caractères, mon cher Gabriel, venez me voir; mais surtout, encouragez les Conseillers vos amis à se conduire avec autant de sagesse que de fermetté. Il faut qu'ils engagent adroitement tous les ministres à faire des représentations. Il faut qu'ils animent la voix des meilleurs citoiens, il faut qu'ils réduisent la canaille au silence en faisant connaître les endroits blasphématoires et séditieux, et qu'ensuitte ils punissent, non pas un livre qu'on ne peut punir, mais un coquin digne des châtiments les plus sévères.

On m'assassine depuis un an, de deux mille Lettres au sujet des souscriptions de Corneille. En voicy encor une; que voulez vous que je réponde?