1764-06-20, de Voltaire [François Marie Arouet] à marchese Francesco Albergati Capacelli.

Par ma foi, Monsieur, je crois que j'irai bientôt retrouver Francesco Algaroti.
Sa conversation était fort agréable; je m'entretiendrai de vous avec lui, ce sera ma consolation; mais je ne me ferai point dresser de monument de marbre, quoi qu'il y ait en Suisse d'assez beau marbre et un assez bon sculpteur. Je trouve que les mausolées ne doivent être érigés que par les héritiers. Je suis affligé de sa perte, il avait du mérite, et c'était un des meilleurs infarinati que nous eussions. Nôtre ami Goldoni ne passera pas sitôt par mon petit hermitage. Il me parait qu'il restera longtemps à Paris.

Je vois, Monsieur, par vôtre Lettre, que vous donnez les plus belles fêtes d'Italie. On peut faire ailleurs des courses de chevaux, mais vous courez sur le cheval Pégase, vous donnez des plaisirs à l'esprit tandis que d'autres n'en donnent qu'aux yeux. Mes yeux ne sont plus guères capables d'avoir du plaisir, mais mon âme a un plaisir bien sensible à être un peu aimée de la vôtre. Agréez, Monsieur, les aussurances de mon respectueux attachement.

V.