1764-05-28, de Voltaire [François Marie Arouet] à Cosimo Alessandro Collini.

Mon cher confrère en historiograferie, je crois que vous avez [été] très content de notre confrère M. Mallet qui s'en va historiografer1 le landgraviat.
Je vous présente toujours quelque étranger. En voicy un qui a une autre sorte de mérite. Mais vrayment il n'est point étranger à Manheim. C'est un palatin. Il est vray qu'il est lutherien et qu'il demande une cure lutherienne. Vous ne vous mêlez pas de ces œuvres pies ou impies, ny moy non plus. Il m'est fortement recommandé, et je vous le recommande autant que je peux. Dittes luy du moins comment il faut s'y prendre pour obtenir l'honneur de brailler en allemand pour de l'argent. Indiquez luy la route qu'en vérité je ne connais pas. Je vous écris de ma main mais c'est avec une difficulté extrême. Ma fluxion s'est jettée sur la gorge et m'empêche de dicter. Je ne sçais pas comment je suis en vie avec tous les maux qui m'assiègent. Ils n'ont point encor pris sur l'âme, et ils laissent surtout des sentiments à mon cœur qui est à vous.

V.