6e avril 1764
Il est nécessaire, Monsieur, que je reçoive incessamment les intentions précises de vos saints et imbéciles martirs.
S'ils peuvent venir à la Cayenne avec chacun environ mille francs en éffets convenables à ce païs là, je vous réponds qu'ils seront très bien reçus. Ceux qui préfèrent une chaine de galériens à un climat qui est sous la ligne, sont bien les maîtres de rester aux galères, où ils resteront certainement jusqu'à la fin de leur vie, mais ceux qui seront assez sages pour s'embarquer trouveront le plus beau climat de la nature, où l'on peut cultiver avec le plus grand succez, le cotton, la soie, le sucre, le cacao et l'indigo, et faire en peu de temps une fortune considérable. Si quelques familles protestantes veulent se joindre aux sages galériens, elles feront très bien de quitter un païs où elles seront persécutées, pour un païs où elles jouïront d'une liberté entière, et où elles gagneront beaucoup d'argent, ce qui après la liberté et les pseaumes de Marot est une fort bonne chose. Je vous prie de m'instruire le plutôt que vous pourez, de tout ce qu'il faudra représenter au ministre. Il n'y a pas un moment à perdre si on veut que la chose réussisse. Je vous prie de faire mes compliments à mr et à made Mallet si vous les voiez, et d'être bien persuadé de tous les sentiments que j'ai pour vous.
V.