1764-03-21, de Voltaire [François Marie Arouet] à Charles Augustin Feriol, comte d'Argental.

J'allais faire partir ce petit morceau pour la gazette Littéraire, lorsque je reçois la Lettre du 15 Mars de mes anges.
Ils me donnent de grandes espérances contre ces dixmes établies de droit divin et contre le concile de Latran. Nous espérons tout des bontés de mes anges, et de Monsieur le Duc de Praslin. J'aimerai mes neiges et mon terrein ingrat, je le cultiverai avec bien plus de soin; il n'était pas juste, en vérité, que ce fût moi qui semât et labourât pour la sainte Eglise.

Tant mieux qu'Olimpie soit retardée, elle en sera mieux jouée et mieux reçue, et plus le carême sera avancé, moins il y aura de honte à n'avoir qu'un petit nombre de représentations.

Je reviens à la gazette Littéraire. Je m'imagine que les auteurs, en rectifiant les petits mémoires que j'envoie, et en y mettant les convenances dont je ne me mêle point, pouront procurer au public des morceaux assez intéressants; j'en prépare un sur des ouvrages qui me sont venus d'Italie. Je cherche partout des morceaux piquants qui puissent réveiller le goût du public, mais je n'en trouve guère. Le nombre des ouvrages nouveaux sera toujours très grand, et le nombre des ouvrages intéressants bien petit. Je vais travailler si ma pauvre santé me le permet, c'est à dire je vais dicter, car je ne peux plus rien faire de mes organes.

Respect et tendresse.

V.