28 septembre 1763
Le solitaire à qui m. Ribotte écrit quelquefois a trois tristes qualités, celles d'être vieux, malade et paresseux.
Il se réveille quelquefois, tantôt pour soutenir un pauvre roué, dont par parenthèse, le procès commencera après la saint Martin, tantôt pour donner sur le nez à Simon Lefranc, attendu que Simon Lefranc porte le nez un peu trop haut, tantôt pour prêcher la tolérance au long et au large. Il est fort aise que vos protestants assemblent des synodes et serait encore plus aise que les philosophes en assemblassent. Il a entendu dire qu'on avait imprimé a Paris un petit catéchisme de l'honnête homme, dont tous les honnêtes gens sont assez contents, il a entendu dire aussi qu'on en enverrait à m. Ribotte si on pouvait lui faire tenir le paquet franc de port; la vérité est bonne, mais il ne faut pas qu'elle ruine. Cinq ou six cents citoyens de Genève vont faire des représentations au conseil pour la quatrième fois sur la manière dont ledit conseil en a usé envers Jean Jacques Rousseau leur concitoyen. Ils prétendent qu'un bourgeois de Genève a le droit de tourner en ridicule la religion chrétienne tant qu'il veut, qu'on doit disputer amiablement avec lui et non pas le condamner sans l'entendre. Le nombre des philosophes qui augmente prodigieusement rit de tout cela et fait bien. Que monsieur Ribotte rie, si jamais il fait un voyage dans nos quartiers, je le prie de venir rire chez moi.