Monsieur,
C'est sous Les auspices de Monsieur votre frère avec qui je suis Lié depuis Longtemps d'une tendre amitié que je me suis permis de faire passer, dans votre couvert un paquet de papiers pour Monsieur de Voltaire, que Messrs Tronchin et Camp de Lyon voudront bien vous faire parvenir.
Mr votre frère a eu la bonté de me faire espérer que vous voudrés bien vous charger de remettre ce paquet à M. de Voltaire. Il contient avec Les mémoires imprimés de La Compagnie des Indes et de m. Law contre mrs Dupleix, une Longue Lettre que je Luy écris au sujet de divers passages de son Essay sur L'hist. Générale où il parle de La Comp. des Indes.
Attaché depuis plus de 15 ans à cette compe par ma place de directeur et plus ancienement par un sindicat momentané que j'exerçay en 1745 conjointement avec votre compatriote et confrère Monsr Saladin d'Onex je ne puis être indifférent sur L'opinion que m. de Voltaire a pris de La Compe des Indes, et sur L'impression qu'en recevront nos contemporains et La postérité sur La foy d'un Ecrivain aussy célèbre. Il est évident qu'il s'en est raporté à des mémoires infidèles, et je suis très persuadé que quand il aura reconu Les erreurs dont il s'est Laissé prévenir, il prendra des mezures pour réparer Le tord qu'il fait à La réputation de cette Compe et de ceux qui sont chargés de son administration. En mon particulier jaloux come je dois l'être de La réputation de probité et de fidélité que j'ose dire que je mérite, je désire infiniment d'avoir une réponse de M. de Voltaire aux observations que je Luy fais. Je vous auray une véritable obligation Monsieur de me La procurer, ou de me dire s'il restera des douttes à M. de Voltaire après qu'il aura reffléchy sur ma Lettre. S'il a besoin de plus grands éclaircissements je suis en état de Les Luy procurer d'autant plus aisément qu'il y a peu de membres de L'administration de La Compe qui se soyent autant occupé que moy des affaires et de L'administration générale de La Compe des Indes et qui ayent autant écrit que moy.
J'ay l'honneur d'être avec respect
Monsieur,
Votre très humble et très obéissant serviteur
Gilly
Paris Le 29 juillet 1763