1763-03-12, de Voltaire [François Marie Arouet] à Paul Claude Moultou.

C'était un vilain jour pour moi, Monsieur, que celui où j'étais à Ferney quand vous me faisiez l'honneur de venir aux Délices; mais c'est un bien beau jour, malgré la bize et la neige que celui où nous aprenons l'arrêt du conseil, et la manière dont le Roy a daigné se déclarer contre les dévots fanatiques, qui voulaient qu'on abandonnât les Calas.
Nous devons beaucoup à M. le Duc de Choiseuil, et surtout à mr le Duc de Praslin. Le règne de l'humanité s'annonce. Ce qui augmente ma joye et mes espérances, c'est l'attendrissement universel dans la galerie de Versailles. Voilà bien une occasion où la voix du peuple est la voix de Dieu. Je parie que vous avez pleuré de joye en aprenant cet heureux succez.

Je vous demande pardon de vous avoir fait lire mes esquisses informes, mais je crois vous devoir des prémices, comme un tribut que mon cœur et mon esprit payent au vôtre.