21 juillet [1762] aux Délices
Lisez cela monseigneur, je vous en conjure, et voyez s'il est possible que les Calas soient coupables.
L'affaire commence à étonner et à attendrir Paris, et peutêtre s'en tiendra t'on là. Il y a d'horribles malheurs qu'on plaint un moment, et qu'on oublie ensuitte. Cette avanture s'est passée dans votre province. Votre Eminence s'y intéressera plus qu'un autre. Je peux vous répondre que tous les faits sont vrais. Leur singularité mérite d'être mise sous vos yeux.
Cette tragédie ne m'empêche pas de faire à Cassandre touttes les corrections que vous m'avez bien voulu indiquer. Malheur à qui ne se corrige pas, soy, et ses œuvres. En relisant une tragédie de Marianne que j'avais faitte il y a quelques quarante ans, je l'ay trouvée platte et le sujet beau. Je l'ay entièrement changée. Il faut se corriger eût on quatrevingt ans. Je n'aime point les vieillards qui disent, j'ay pris mon ply. Eh vieux fou prends en un autre, rabote tes vers si tu en as fait, et ton humeur si tu en as. Combattons contre nous même jusqu'au dernier moment. Chaque victoire est douce. Que vous êtes heureux monseigneur! Vous êtes encor jeune et vous n'avez point à combatre.
E per fine baccio il limbo della sua sacra porpora.
V.