1762-06-21, de Voltaire [François Marie Arouet] à Charles Augustin Feriol, comte d'Argental.

Mes divins anges, je suis persuadé plus que jamais, de l'innocence des Calas et de la cruelle bonne foi du parlement de Toulouse, qui a rendu le jugement le plus inique sur les indices les plus trompeurs.
Il y a quelques mois que le conseil cassa un arrêt de ce même parlement, qui condamnait des créanciers légitimes, à faire réparation à des banqueroutiers frauduleux. L'affaire présente est d'une tout autre conséquence; elle intéresse des nations entières, et elle fait frémir d'horreur. On cherche toutes les protections possibles auprès de mr le cte de St Florentin. On a imaginé que la Popliniere pourrait faire présenter à ce ministre, la veuve Calas par André ou la Guerche.

Probablement la Popliniere m'écrira une lettre qu'il adressera chez vous. Je vous supplie de l'ouvrir. La veuve Calas qui doit venir vous demander votre protection, lira cette lettre de la Popliniere, et se conduira en conséquence.

Daignez, mes anges, mettre toute votre humanité, toute votre vertu, toutes vos bontés, à faire connaître la vérité dans une affaire aussi essentielle. La poste va partir, je n'ai ni le temps, ni la force de vous parler d'autre chose, que de l'innocence opprimée, qui trouvera des protecteurs tels que vous.

Mille tendres respects.

V.