1762-07-07, de Honoré Armand Hector de Villars, duc de Villars à Voltaire [François Marie Arouet].

Je viens d'écrire, monsieur, comme vous le souhaitiez à m. le comte de st Florentin en faveur de madame Calas.
Je prie ce ministre de vouloir bien prendre connaissance des motifs de l'arrêt rendu contre son mari par le parlement de Toulouse, que de simples indices peuvent avoir trompé, et de lui accorder sa protection pour faciliter les moyens de justification qu'elle peut avoir; c'est à peu près ce que j'ai cru devoir dire à m. de st Florentin: je n'ai pas pu lui assurer que l'arrêt était injuste parce que je ne le crois pas. Les pièces que vous m'avez envoyées, et dont je vous remercie, ne me font point changer de sentiment. Je n'y vois que ce que j'ai déjà lu dans les mémoires imprimés pour les Calas et malheureusement pour eux, c'est sur la procédure seule, qui ne s'accorde point avec ces mémoires, et que vous ni moi ne connaissons pas, que les juges ont condamné le père. Je souhaite de me tromper en croyant que le fanatisme peut faire commettre les crimes les plus horribles, et que treize juges ne condamnent pas unanimement un homme au plus affreux des supplices sans être bien assurés qu'il est coupable. Pour vous, m., vous ne vous tromperez jamais en croyant qu'on ne peut rien ajouter au tendre et sincère attachement que j'ai pour vous, et qui ne finira qu'avec ma vie.