à Ferney 6 xbre 1761 partira quand poura
Disposez, ordonnez; je pars avec douleur de Ferney où j'ay bâti un très joli téâtre, pour aller sur le territoire damné de Geneve qui a déclaré la guerre aux téâtres.
Ne trouvez vous pas qu'il faudrait brûler cette ville? En attendant que dieu fasse justice de ces hérétiques, ennemis de Corneille et du pape, je ferai transcrire l'œuvre des six jours tel qu'il est. Je n'y veux rien changer. Je veux devoir les changements à vos conseils, et sur tout à l'impression que cela fera sur le cœur de madame de Chauvelin car soit dit sans vous déplaire, tous les raisonements des hommes ne valent pas un sentiment d'une femme. Je ne dis pas cela pour vous dénigrer, mais je prétends que si vous aprouvez, et que si made de Chauvelin est émüe, la pièce est bonne, ou du moins touchante ce qui est encor mieux. En un mot, vous l'aurez et je vous remercie de me l'avoir demandée.
Je me mets aux pieds de votre belle actrice. Quand verrai je le jour où elle jouera la fille, et me Denis la mère, et moy le bon homme! Je persiste fermement dans l'opinion où je suis que dieu nous a créés et mis au monde pour nous amuser. Que tout le reste est plat ou horrible. Je supplie votre excellence de vouloir bien dire à monsieur Gastaldi, combien je l'estime, j'ose dire même combien je l'aime.
Recevez mes très tendres respects.