[c. 31 May 1761]
Mes philosophes me donnent grande envie de voir cet ouvrage de m. Dardelle.
Je ne connais que l'eau d'Ardelle, et je ne sais si elle est bonne pour la brûlure. Au reste c'est à m. Dardelle à répondre de tout.
Pourrait on déterrer dans Paris quelque pauvre diable d'avocat, non pas dans le goût de Le Daim, mais un de ces gens qui étant gradués et mourant de faim, pourraient être juges de village? Si je pouvais rencontrer un animal de cette espèce, je le ferais juge de mes petites terres de Tourney et Ferney. Il serait chauffé, rasé, alimenté, porté, payé.
J'ai un besoin pressant du malheureux droit ecclésiastique qui ne devrait pas être un droit. J'ai un procès pour un cimetière: il faut défendre les vivants et les morts contre les gens d'église. Mille pardons de mes importunités, mes chers philosophes.
Mes compliments de condoléance à frère Berthier et à frère La Valette, mille louanges à me Le Daim qui traite Corneille d'infâme; mais il ne faut montrer la conversation de l'abbé Grisel et de l'intendant des menus qu'au petit nombre des élus dont la conversation vaut mieux que celle de me Le Daim. On supplie les philosophes de ne montrer le cher Grisel qu'aux gens dignes d'eux, c'est à dire à peu de personnes.
Je souhaite que M. Le Mière soit bien damné, bien excommunié, et que sa pièce réussisse beaucoup, car on dit que c'est un homme de mérite, et qui est du bon parti. Je prie les frères de vouloir bien m'envoyer des nouvelles de Térée.
Courez tous sus à l'infâme habilement: ce qui m'intéresse c'est la propagation de la foi, de la vérité, le progrès de la philosophie, et l'avilissement de l'inf.
Je vous donne ma bénédiction du fond de mon cabinet et de mon cœur.