1761-01-15, de Voltaire [François Marie Arouet] à Nicolas Claude Thieriot.

Reçu une feuille du censeur hebdomadaire, et l'histoire de la nièce d'Eschile.
Je voudrais voir de quel poison se sert l'ami Frelon pour noircir le zèle, l'ode, et les soins de Mr Le Brun. Comment sçait-il que L'Ecluse est venu dans nôtre maison, et que peut-il dire de ce L'Ecluse? Il finira par s'attirer de méchantes affaires; vous ne pouvez avoir encor le chant de la capilotade. Il faut bien constater l'avanture de Grisel avant de le fourer là.

J'ai voulu avoir le recueil h, parce que j'avais les précédents; voilà comme on s'enferre souvent.

Il n'y a pas moyen de vous faire tenir encor, l'Epître à mlle Clairon; il faut attendre qu'elle se porte bien, qu'elle rejouë Tancrède et que certaines gens aprouvent les petites hardiesses de cette Epitre. Je suis convaincu que l'acharnement de Freron contre un homme du mérite de Mr Diderot, fera grand bien au père de famille.

Vous demandez des détails sur mon triomphe de gente Jesuitica. Ce triomphe n'est qu'une ovation, nul péril, nul sang répandu; les Jésuites s'étaient emparés du bien de mesrs de Crassy, parce qu'ils croyaient ces gentilhommes trop pauvres pour rentrer dans leur domaine. Je leur ai prêté de l'argent sans intérêt, pour y rentrer, les Jésuites se sont soumis, l'affaire est faitte; s'il y a quelques discussions on fera un petit factum bien propre, que vous lirez avec édification. Voilà, mon ancien ami, tout ce que je peux vous mander pour le présent. Interim vale.

V.