24e Juillet 1760
Si vous ne m'avez point répondu, madame, sur l'honneur que je veux que mr Diderot fasse à l'académie, vous avez tort; si vous m'avez écrit, vôtre Lettre est en chemin.
En attendant qu'elle m'aprenne ce que je dois penser, je pense qu'il faut absolument que Mr Diderot fasse ses visites quand il en sera temps; je pense qu'alors il faut qu'il déclare dans le public qu'il ne prétend point à la place, mais qu'il veut seulement préparer la bonne volonté des académiciens pour la première occasion. Il aura sûrement dix ou douze voix, et ce sera un triomphe d'autant plus grand, qu'il passera pour ne les avoir pas demandées; mais il poura fort bien les avoir toutes si en allant voir les dévôts, il les persuade de sa religion. Ils croiront l'avoir converti, et ce sera lui qui triomphera d'eux; il est très vraisemblable qu'il sera protégé par made de Pompadour; en un mot, ou il entrera, ou il se préparera l'entrée; et dans l'un ou dans l'autre cas, il aura le public pour lui. Je souhaitte, ma belle philosophe, que vous soyez de mon avis.
Je ne vous parle point de la ridicule idée qui a passé par la tête d'un seul homme, que le Chef de l'enciclopédie était désigné dans le pauvre diable; cette sottise ne mérite pas qu'on y pense.
Je regarde comme un coup de partie la tentative de L'académie. Est il possible que tous les gens qui pensent ne se tiennent pas par la main, et qu'ils soient la victime des fripons et des sots?
Est il vray madame qu'on a pendu 22 jésuittes à Lisbonne? Je n'en demande que deux à Paris avec deux jansénistes, seulement pour l'édification.