A Freyberg ce 3 d'avril 1760
Quelle rage vous anime encore contre Maupertuis?
Vous l'accusez de m'avoir trahi. Sachez qu'il m'a fait remettre ses vers bien cachetés après sa mort, & qu'il était incapable de me manquer par une pareille indiscrétion.
Vous en revenez encore à la paix. Mais quelles conditions! Certainement les gens qui la proposent n'ont pas envie de la faire. Quelle dialectique que la leur! Céder le pays de Clèves, parce qu'il est habité par des bêtes! Que diraient ces ministres, si on demandait la Champagne, parce que le proverbe dit: Nonante-neufs moutons & un Champenois font cent bêtes? Ah! laissons tous ces projets ridicules. A moins que le ministre français ne soit possédé de dix légions de démons autrichiens, il faut qu'il fasse la paix. Vous m'avez mis en colère; votre repentir obtiendra votre pardon. En attendant, je vous abandonne à vos remords & aux furies vengeresses qui poursuivent les calomniateurs, jusqu'à ce que cette religion naturelle que vous dites innée renouvelle les traces qu'elle avait autrefois imprimées dans votre âme. Vale.