aux Délices 17 février [1760] au soir
Après une longue conversation monsieur, avec Labat, nous concluons qu'il faut poursuivre avec chaleur l'affaire de la libération de la province.
Il nous a paru que de six mille minots il pourait nous en rester quelques uns en perte; que pour réparer cette perte, il serait bon de joindre au dernier projet un des articles du premier, qui consisterait en un impost léger sur chaque bête à corne. Je n'imagine pas le plus léger obstacle à cette entreprise. Cependant il ne faut compter les affaires faittes que quand elles sont faittes.
Je ne doute pas que vous ne pressiez la conclusion de cellecy. Mr l'intendt peut avoir quelques conférences avec les fermiers généraux, et accélérer la conclusion. Je ne crois pas que l'article du bled fasse la moindre difficulté. Pourquoy s'opposer à un commerce libre qui enrichirait le pays et le Roy? Au reste nous avons reçu des lettres satisfaisantes de M. le contrôleur général, de M. l'intendant et des fermiers généraux sur le 1er mémoire envoyé le 24 janvier au soir; ce mémoire n'était qu'un préliminaire. Nous n'étions pas encor informé de l'excez de l'insolence, et des délits des commis du bureau de Saconex. Nous avons envoyé touttes les preuves à mesure que nous les avons eües et nous nous flattons que les déclarations du receveur et du controlleur de Saconnex achèveront de constater le délit, et de nous procurer la justice que nous attendons. Puisse la consommation du traitté avec les fermes générales, mettre fin à ces vexations et à ces avanies intolérables.
J'ay l'honneur d'être pour toutte ma vie
Monsieur
Votre très humble et très obéisst serviteur
Voltaire