au Chêne à Lausane 6 septembre [1757]
Monsieur,
Je vous renouvelle mes remerciments de la bonté que vous avez euë de me communiquer les mémoires concernants Monsieur vôtre oncle, le célèbre général Lefort.
J'en ai tiré tout ce qui peut servir à sa gloire & à celle de vôtre famille, et j'ai déjà envoïé à Petersbourg une partie de l'ouvrage.
Uniquement occupé de cette entreprise dans laquelle vôtre nom est si fort intéressé, permettez que je m'addresse à vous comme au Doyen du Consistoire pour vous prier de vouloir bien détourner tout ce qui pourait retarder le travail auquel je me suis consacré.
J'ai apris que quelques personnes avaient fait imprimer dans un mercure de Neufchatel une dissertation en forme de Lettre sur un point historique du seizième siècle. Je n'ai point lû cette dissertation. J'apprends aussi que quelques pasteurs de Suisse répondent à cet écrit. Je n'entre en aucune manière dans cette dispute critique et historique. Elle est absolument étrangère aux travaux que L'Impératrice de Russie a daigné me prescrire, et que le nom de Lefort me rend si chers.
Je sçais que ces petites disputes ont pris leur origine dans je ne sçais quelle Lettre qu'on a imprimée sous mon nom dans le mercure de France du mois de Mars ou d'avril.
Quoi que je ne Lise jamais les journaux, cependant on m'a fait voir cette Lettre il y a deux mois. Je n'y ai retrouvé ni mes expressions, ni mes sentiments sur bien des articles. Cette Lettre a été très infidèlement copiée; et on m'en a fait même des excuses de Paris.
Au reste, Monsieur, je vous prie de vouloir bien communiquer cette Lettre à votre Illustre compagnie ainsi que ma vénération pour vous et pour elle.
J'ai l'honneur d'être avec les sentiments les plus respectueux
Monsieur
Vôtre très humble et très obéïssant serviteur
Voltaire gentilho orde du roy de l'académie française