1757-04-23, de Voltaire [François Marie Arouet] à Michel Lambert.

Quand j'ay sçu que vous faisiez une édition de l'histoire générale, je vous ai recommandé très instament monsieur de ne la point annoncer augmentée.
Je ne vous ai envoyé que deux ou trois additions au catalogue des genes de lettres, qui n'entre point dans le corps de l'histoire. Ces petites corrections absolument nécessaires ne contiennent pas un quart de feuille. Ce serait tromper le public, me compromettre, et m'outrager que d'annoncer votre édition comme augmentée; je serais obligé de m'en plaindre dans tous les journaux. J'ay droit d'ailleurs de me plaindre à vous même de ce que vous ne m'avez pas répondu quand je vous ay prié de ne point induire le public en erreur par le titre d'Edition augmentée. J'aprends aussi que votre édition des œuvres mêlées n'est pas conforme à celle qu'on a faitte sous mes yeux. Vous sentez que j'en dois être peiné. Aussi vous ne me l'avez pas envoiée. J'attendais de vous plus d'attention quoy que vous ne soyez pas trop exact. Comptez encor une fois que le public vous saura très mauvais gré d'annoncer comme augmenté ce qui ne l'est pas. Je vous prie très instament de ne pas hazarder de lui déplaire pour un mot qui ne trompera personne. Je ne puis trop insister sur cette prière, et j'attends de votre amitié et de votre probité que vous ne me refuserez pas. Comptez que je reconnaîtrai cette attention par mes sentiments.

Voltaire