1755-08-06, de Charles Manoël de Végobre à Antoine Court de Gébelin.

Monsieur,

…Hier par arrêt du Petit Conseil fut brûlé ici par la main du boureau le Poëme encore manuscrit intitulé la Pucelle d'Orléans dont on fait honneur à Voltaire.
Il avoue d'y avoir travaillé et que le fond est de lui; mais il désavoue hautement les libertés qu'on y trouve contre des noms respectables, et les horribles impiétés qu'il y a contre la religion. Je ne sais si l'on nous envie en Suisse l'avantage que nous avons d'avoir ici le fameux Poëte. Ce qu'il y a de vrai c'est que son crédit diminue un peu ici, et que bien des gens le verroient partir sans regret. Au reste je ne puis vous parler de l'ouvrage dont il s'agit que par oui dire. J'en ai vu seulement le 1r chant, et il y en a 14. J'ai trouvé du tour et de l'esprit dans le morceau que j'ai lu. C'est à peu près dans le goût et le stile du Ver-vert….

J'ai l'honneur d'être avec une estime distinguée,

Monsieur,

Votre très humble & très obéissant serviteur

De Vegobre