1755-04-20, de Voltaire [François Marie Arouet] à Michel Guyot de Merville.

La vengeance, monsieur, fatigue l'âme, & la mienne a besoin d'un grand calme.
Mon amitié est peu de chose, & ne vaut pas les grands sacrifices que vous m'offrez. Je profiterai de tout ce qui sera juste & raisonnable dans les quatre volumes de critiques que vous avez faites de mes ouvrages, & je vous remercie des peines infinies que vous avez généreusement prises pour me redresser. Si les deux satires que Rousseau & Desfontaines vous suggérèrent contre moi, sont agréables, le public vous applaudira. Il faut, si vous m'en croyez, le laisser juge.

La dédicace de vos ouvrages, que vous me faites l'honneur de m'offrir, n'ajouterait rien à leur mérite, & vous compromettrait auprès du gentilhomme à qui cette dédicace est destinée. Je ne dédie les miens qu'à mes amis. Ainsi, monsieur, si vous le trouvez bon, nous en resterons là.