1755-01-05, de Voltaire [François Marie Arouet] à Michel Lambert.

Madame Denis a reçu, monsieur, votre lettre du 25 Xbre.
Vous lui mandez avoir expédié à l'âdresse de Mr Fleur à Besançon un paquet de livres: c'est ce que vous aviez déjà mandé à Monsieur de Voltaire il y a longtemps; et Mr Fleur n'a reçu ni paquet, ni lettre d'avis. Vous ajoutez aujourdui que dans le même paquet il y a du caffé et des étoffes: c'est une nouvelle raison pour nous faire désirer de savoir si conformément à l'usage, vous avez envoïé un billet d'avis à Mr Fleur, et si vous l'avez informé du départ du ballot, et du nom du voiturier.

Quand les banquiers ne reçoivent ni lettres ni ballots, il est très-sûr qu'on ne leur en a point adressé: ainsi il faut qu'il y ait dans tout cela quelque méprise. Nous souhaiterions plus de régularité et plus d'exactitude dans les choses dont vous voulez bien vous charger. Vous n'avez jamais accusé la réception du paquet du siècle de Louis XIV, envoïé de Strasbourg: vous n'avez jamais envoïé la suite de la Henriade; vous demandez aujourdui le second volume au bout de quatre mois, après avoir passé ces quatre mois entiers sans répondre à aucune des lettres qu'on vous a écrites sur ce sujet.

A l'égard des éffets que Pagni a volés, madame Denis et Mr de Voltaire vous prient de donner le billet de Pagni au Procureur qui viendra vous le demander avec un billet signé de Mr de Voltaire. Ils vous réitèrent tous deux la prière de faire remettre à Madlle Pichon tous les livres tirés de leur bibliothèque. Loin d'en vendre ils veulent en acheter de nouveaux: on s'adressera à vous; et Mr Fleur vous remettra l'argent, quand vous lui aurez fait des envois avec lettres d'avis, et selon les règles du commerce; le tout sans que la Poste retienne ou décachète vos lettres, ce qui n'arrive assûrément à personne.

Nous vous faisons mille amitiez madame Denis et moy. Je suis très malade.

V.