1754-03-13, de Voltaire [François Marie Arouet] à Marie Ursule de Klinglin, comtesse de Lutzelbourg.

Grand merci, Madame, de vôtre consolante lettre; j'en avais grand besoin comme malade, et comme persécuté.
Ce sont des bombes qui tombent sur ma tête en pleine paix. Il n'y a que deux choses à faire dans ce monde, prendre patience ou mourir. Madame du Defent me mande qu'il n'y a que les fous et les imbécilles qui puissent s'accomoder de la vie; et moi je lui écris que puis-qu'elle a des rentes sur le Roi, il faut qu'elle vive tout le plus longtemps qu'elle poura, attendu qu'il est très-triste de laisser le Roi son héritier quelque bien aimé qu'il puisse être.

Comment trouvez-vous, Madame, la lettre du Garde des sceauxà Monsr l'Evêque de Metz? pour moi je crois que l'Evêque de Metz l'excommuniera: le trésor roïal est déjà en interdit. Je me flatte de venir au temps de Pâques faire ma cour aux deux habitantes de l'Isle Jar, et de leur apporter mon billet de confession.

On va plaider bientôt ici l'affaire de Monsieur vôtre neveu, et de Madame vôtre belle-sœur3. Cela est bien triste; mais je ne vois guères de choses agréables. Supportons la vie, Madame, nous en jouissions autrefois. Recevez mes tendres respects.